2021 > La bouche pleine de mots : Wakáhton (finalistes)

Proposition finaliste pour l'œuvre d'art public de l'agrandissement de l'école des Jeunes-Riverains à Saint-Anicet dans le cadre de la Politique d'intégration des arts à l'architecture et à l'environnement du Québec.

Description tirée d'extraits du texte de présentation:

Inspirations
Dans cette optique de chantier créatif, nous nous sommes mis à l’ouvrage grâce à la Société historique de Saint-Anicet, le Centre d'interprétation du site archéologique Droulers-Tsiionhiakwatha et des individus passionnés d’Ahkwesásne et de Kahnawà:ke. Nous avons pu découvrir entre autres des informations extrêmement pertinentes sur l’importance de la culture du maïs dans la région. Autant en consultant une superbe publication de la Société historique : Saint-Anicet d’hier à aujourd’hui (2012), qu’en visitant le site archéologique, qui est administré en collégialité entre Saint-Anicet et le conseil de bande d’Ahkwesásne. Notre visite de Tsiionhiakwatha « Là où l’on cueille les petits fruits », nous a permis de vivre une incursion à échelle humaine dans l’univers d’un peuple iroquoien du Saint-Laurent (probablement du 16e siècle). Les fouilles ont montré que le maïs, le haricot et la courge faisaient partie de leur alimentation (les trois sœurs : kionhekwa). Un jardin y est d’ailleurs entretenu grâce aux connaissances et aux semences partagées par Steven McComber de Kahnawà:ke. Nos recherches nous ont ensuite menés vers la boutique Kaienthókwen (la récolte) de Kahtehrón:ni Iris Stacey qui prône tout comme McComber la souveraineté alimentaire.

[voir la suite du texte sous les images]

Suite...

Bien avant cette visite, lors de la rencontre technique, Guillaume est allé au village et à son arrivée devant l’impressionnante église de style roman-Byzantin (1887), un tamia rayé alias le p’tit suisse, l’a accueilli sur le parvis. Il n’en fallait pas plus pour faire germer une idée. Notre guide au site Droulers n’a pas manqué de nous raconter comment la population locale de tamias a mangé tous leurs grains de maïs secs décoratifs. Ces anecdotes additionnées n’ont fait que confirmer nos intentions d’inclure l’adorable petit rongeur.

En arrivant à l’école, c’est un ohrhió:ken, un tamia géant la bouche pleine de grains de maïs ou quelques semences de la sorte, qui accueille ses hôtes. Celui-ci n’est pas seul ! Deux de ses comparses se pointent le bout du museau de l’autre côté de la passerelle aussi sur des rochers, comme ceux qu’on peut apercevoir dans les champs de la région. Ces rocailles naturelles, à la surface travaillée par les années et souvent habitée par des mousses vertes, continueront de se transformer avec le temps. Autre fait divers : comme premier boulot saisonnier, à l’âge de 12 ans, le papa de La Famille Plouffe a d’ailleurs accompagné son oncle dans la région pour aller y chercher des pierres décoratives sur les terres des fermiers. Les trois tamias sont dessinés à la main aux crayons de couleur. Les traits crus versicolores s’agencent avec deux des couleurs Pantone du concept architectural intérieur. Dans l’ensemble, l’œuvre offre surtout des couleurs chaudes, mais des bleus viennent ponctuer l’harmonie chromatique.

Les diagonales dynamiques des plants de maïs gargantuesques se dressent en deux ensembles de chaque côté de la passerelle. Les triades comportent des maïs aux grains rouges, bleus, blancs et jaunes. Nous avons choisi d’employer des variétés autochtones d’ó:nenste (maïs) qui proviendront vraisemblablement de Kahtehrón:ni Iris Stacey pour les trois modèles qui serviront à produire les moules. Les jeux de couleurs et d’échelles ludiques sont attrayants, mais recèlent aussi des processus de création plus riches et des détails visuels captivants qui pourront être découverts de plus près autant à l’extérieur qu’à l’intérieur grâce aux murs rideaux de la passerelle.

Intégration à l’architecture et à l’environnement:
L’installation s’harmonise formellement avec le bâtiment entre autres avec les pointes des triangles sur les murs extérieurs et aux planchers de la passerelle ainsi qu’avec les couleurs chaudes des briques. Il est intéressant de noter qu’à partir de la passerelle, les regardeurs pourront faire des associations formelles aussi avec les « cabanes » qui se trouvent à proximité dans le concept architectural. D’un autre côté, l’œuvre offre de forts contrastes par ses formes organiques des dessins et des maïs juxtaposées aux lignes droites de l’école. Puis, la finesse et l’échelle des dessins et des épis de maïs détaillés offrent un contrepoids à l’aspect plus monumental de l’ensemble de l’œuvre. Ces propositions fantaisistes improbables inspirent tout autant le dépassement de soi que la découverte, mais également la notion d’équilibre. Nous proposons soit de garder l’aménagement paysager prévu avec quelques buissons en moins dans l’espace dédié à l’œuvre (pour dissuader de s’en approcher), soit une friche herbacée et fleurie ou du trèfle (deux options avec peu d’entretien qui permettent d’admirer l’œuvre de plus près).

Intégration in socius:
Comme nous avons tissé des liens avec des individus de communautés Mohawks, entre autres pour les modèles de maïs, cette collaboration nous incite à vouloir inclure un vocabulaire Kanien’kéha (Mohawk) dans notre proposition artistique, un peu comme pour le site Tsiionhiakwatha. C’est une façon de sensibiliser et d’habituer les enfants et les plus grands à voir et entendre ces mots que nous connaissons trop peu. Nous avons l’opportunité ainsi de travailler avec Grace Mitchell d’Ahkwesásne pour traduire un certain nombre de mots associés à notre œuvre. En plus d’inclure certains de ceux-ci sur la plaque d’identification, un montage d’enregistrements sonores pourra être disponible soit sur un site de partage sonore, sur le site Web de l’école ou sur un support physique (clef USB ou autre) pour que les enseignants puissent l’utiliser à bon escient. Nous proposons également une tournée des classes avant ou après la réalisation de l’œuvre (suivant les mesures sanitaires en cours à ce moment), pour faire des présentations d’artiste avec des matériaux de fabrication de l’œuvre, des histoires à raconter, le vocabulaire Kanien’kéha et des pages à colorier de nos tamias. Grâce à une initiative de la Société Historique, nous pourrons aussi partager des faits saillants de l’histoire agricole de Saint-Anicet. Finalement, nous débordons vraiment d’idées du genre et souhaitons ardemment prendre le temps avec nos collaborateurs (commission scolaire, école, architecte) d’offrir à la communauté l’opportunité de s’approprier leur œuvre.